Cinq manières de faire échouer une réunion multilingue avec interprètes

Posted on 19 octobre 201519 janvier 2017Categories InterprétationTags , , ,
Salle des Congrès Chambre des Représentants

Salle des Congrès Chambre des Représentants

[Lees hier het originele Nederlandse artikel.]

Depuis quelques mois, la tendance est aux chroniques et articles intitulés « X manières de … ». J’ai été séduit par l’idée d’appliquer la même formule dans mon blog. Résultat : cinq manières de faire échouer une réunion ou une conférence où des interprètes sont (supposés être) à l’œuvre.

Préparation du contenu

Souvent, les clients qui désirent faire intervenir des interprètes, n’aiment pas trop mettre ceux-ci préalablement au courant du propos de la réunion. Les interprètes n’ont pas besoin de savoir tout à l’avance, mais dans la plupart des cas, une bonne préparation relative au contenu de la réunion est absolument nécessaire. Le vocabulaire dans le cadre d’une conférence sur la musculature du plancher pelvien ou sur la castration des porcs ne s’improvise pas. En outre, vouloir à tout prix garder le secret sur la teneur de la matière qui sera abordée, n’a pas beaucoup de sens. Quand se tiendra la réunion, les interprètes pourront difficilement ne pas entendre et voir l’information tenue pour confidentielle. Cela ne signifie par pour autant qu’ils iront crier sur les toits les « secrets » dont ils auront pris connaissance. En somme, l’organisateur d’un événement qui s’accompagne de prestations d’interprétation a intérêt à faire parvenir aux interprètes le plus possible d’information préalable.

Mauvaise organisation

Tout événement, toute réunion coûte (trop) cher. Les collaborateurs désertent leur travail, il faut payer la restauration des participants, peut-être aussi le lieu où se tient l’assemblée, et bien sûr les interprètes. Le risque pour l’interprétation est que l’organisateur – sous prétexte de limiter les frais – fasse le choix d’utiliser par exemple une valisette (appelée « bidule » dans le jargon des interprètes) pour une conférence nécessitant l’utilisation d’une cabine. La valisette n’est pas le substitut bon marché de la cabine. Les deux équipements sont valables, mais pas dans les mêmes circonstances. Il est possible (et même fort probable) qu’une partie du travail d’interprétation tourne mal en raison d’un mauvais choix de matériel. Un matériel dont l’utilisation a un coût pour l’organisateur, quoi qu’il arrive. Il est préférable, me semble-t-il, de dépenser un peu plus et d’être assuré de la qualité des prestations.

Vous hésitez sur la meilleure option à prendre ? Dans ce cas, consultez notre guide sur l’interprétation ou téléphonez-nous. Nous examinerons ensemble quelle peut être la solution la plus appropriée pour que votre rassemblement multilingue soit une réussite.

Pas de briefing

Briefer les interprètes et les intervenants ne prend pas beaucoup de temps, ne coûte rien, et favorise à coup sûr le bon déroulement de la réunion. Expliquer brièvement aux interprètes « qui, quoi, où, quand, comment et pourquoi » et faire comprendre aux intervenants qui font une présentation quelles sont les maladresses à éviter pour ne pas compliquer voire rendre impossible le travail des interprètes, demande peu d’effort mais peut avoir un impact considérable sur le confort de l’audience.

Interprétation avec vue

Ne placez pas les interprètes derrière une colonne ou un rideau. Même s’il est vrai qu’une cabine mobile grisâtre n’est pas un modèle de perfection en termes de design, cacher les interprètes, vous fera plus de tort que de bien. Les interprètes qui ne voient pas (bien) leurs conférenciers, traduisent moins bien, point barre. Inversement, les interprètes qui ont une bonne vue sur tout ce qui se passe interprèteront plus facilement et seront surtout plus complets dans leur propos. Le public ne s’en plaindra pas. Si malgré tout vous voulez éviter la présence des interprètes dans la salle où se tient la conférence, vous pouvez opter pour notre système d’interprétation à distance.

Accords pratiques

En lisant ce qui va suivre, vous allez penser que je défonce des portes ouvertes, mais croyez-moi, cela arrive plus souvent que vous ne l’imaginez : il va de soi qu’il importe de réserver les interprètes suffisamment longtemps à l’avance (et pourtant on n’y pense pas toujours lorsqu’on prépare un événement) et de leur communiquer le plus rapidement possible chaque modification d’horaire ou de date. Or chaque année, j’ai plusieurs fois le cas : être contacté un vendredi après-midi par un client qui a besoin d’interprètes pour le lundi, ou arriver sur place une demi-heure à l’avance pour m’entendre dire que la réunion a été annulée la semaine précédente ou qu’elle a été reportée plus tard dans la journée. Cela n’amuse personne, et surtout, cela coûte malheureusement cher au client final.

« Relais », vous dites ?

Posted on 12 novembre 201416 mars 2018Categories InterprétationTags ,

[Lees hier het origineel in het Nederlands.]

Aujourd’hui, je tenterai de clarifier un terme technique que les interprètes aiment utiliser : le relais.

En général, un relais s’impose dès qu’une réunion se tient en trois ou quatre langues. Je prends l’exemple de l’un des clients de Déesse. La langue principale du comité d’entreprise européen de ce client est l’anglais. Cela signifie que la plupart des présentations données par la direction à l’intention de la délégation du personnel, sont en anglais. Cette délégation comprend des collaborateurs de Belgique, de France, de Pologne, de République tchèque, d’Espagne et d’Allemagne. Au total, il faut donc interpréter vers six langues : néerlandais, français, polonais, tchèque, espagnol et allemand. En tout, douze interprètes. Compte tenu que la langue principale est l’anglais, je fais toujours intervenir des interprètes maîtrisant également activement l’anglais, autrement dit, des interprètes capables d’interpréter de leur langue maternelle vers l’anglais. L’anglais est alors considéré comme la langue de « retour ». Pour en savoir plus sur le retour, voyez l’article de blog à ce sujet. Ce qui nous intéresse maintenant, c’est le relais. Mais cela implique que nous avons besoin du retour. Pourquoi ?

Supposons que la délégation polonaise, à l’issue d’une présentation en anglais (qu’elle a donc pu comprendre grâce aux interprètes polonais), souhaite poser une question en polonais. Il est fort probable, par exemple, que les interprètes de la cabine espagnole ou française ne connaissent pas le polonais. Très peu d’interprètes parlent six langues, et encore faut-il qu’elles correspondent exactement aux langues de travail de la réunion. En réalité, c’est encore plus compliqué : au cours de cette mission spécifique, seuls mes interprètes polonais maîtrisent le polonais. Il n’en demeure pas moins que les clients flamands, français et allemands, ainsi que leurs autres collègues, s’attendent à une interprétation vers leur langue maternelle, quelles que soient les combinaisons de langues que mes interprètes puissent couvrir directement.

C’est exactement à ce moment que se produit toute la magie de l’interprétation, grâce à la langue de retour, l’anglais en l’occurrence. Les interprètes polonais traduisent alors le polonais en anglais tandis que les autres cabines n’écoutent pas les propos originaux en polonais, mais bien l’interprétation en anglais afin de la transposer dans leur langue maternelle, telle que l’espagnol ou le tchèque.

Si un Français prend la parole et que la cabine néerlandaise ne comprend pas le français, dans ce cas, les interprètes néerlandophones peuvent écouter l’interprétation (en tant que retour) de l’anglais émanant des collègues français et ainsi interpréter vers le néerlandais.

Tout cela paraît beaucoup plus difficile que ce n’est en réalité pour les interprètes. Dans la pratique, cela revient à mettre au point correctement les postes d’interprétation (les appareils équipés d’un microphone) dans les cabines. Chaque interprète se branche sur les langues qu’il comprend et qu’il peut écouter lorsqu’il ne comprend pas l’orateur. Si un orateur prend la parole dans une langue que l’interprète ne comprend pas, ce dernier peut, d’une simple pression sur un bouton, entendre les collègues qui traduisent dans une langue qu’il comprend bien.

Interpréter par le biais d’un relais comporte également certains inconvénients, tels que le décalage qui se voit doubler, mais ces inconvénients ne font pas le poids face aux avantages du relais.

Décalage lors de présentations PowerPoint

Posted on 15 octobre 201421 décembre 2016Categories Blog, Communication, InterprétationTags , , ,

[Lees hier de originele Nederlandse tekst]

Il y a quelque temps, je me référais sur ce blog à une petite vidéo de Hugh Laurie, dans laquelle il s’amuse à interpréter (de manière quasi consécutive) les propos d’une actrice, produisant ainsi inconsciemment un bel exemple d’un décalage variable. Le décalage est le délai de retard que l’interprète a par rapport à l’orateur. Ce retard est variable et dépend entre autres de la rapidité avec laquelle l’orateur parle, du degré de difficulté du texte et de l’aptitude mentale de l’interprète au moment de l’interprétation.

En principe, un orateur doit très peu tenir compte de ses interprètes, hormis lors de certains moments cruciaux de son allocution. Les fidèles lecteurs de mon blog savent ce que je pense des présentations PowerPoint, mais même si elles ont l’art de m’irriter, ces présentations demeurent incontournables. Une chose est sûre :  lorsqu’un orateur passe trop rapidement d’une diapo à l’autre, le public, qui a besoin d’interprétation, manque une partie du message. Un de ces moments cruciaux, en conséquence, où il faut tenir compte de vos interprètes. À qui la faute ? Vous l’avez deviné : au décalage.

Il n’est pas rare que les conférenciers aient tendance, particulièrement en commentant  des graphiques et des tableaux, de se référer pour ainsi dire physiquement à leurs diapos. « Ici à droite », « au bas du graphique », commentent-ils alors. En soi, cela ne pose pas de problème. Sauf quand des interprètes sont impliqués. N’oubliez pas qu’un interprète a toujours un peu de retard par rapport à son orateur. Qu’est-ce que cela signifie concrètement ? Un orateur finit de commenter sa diapo et passe directement à la suivante. Cet orateur doit réaliser qu’à ce moment, à cause du décalage, l’interprète parle encore de la diapo précédente. Si l’orateur termine de commenter une diapo en disant que « la courbe bleue à droite atteint brusquement des sommets », cela arrivera aux oreilles du public alors que celui-ci regarde déjà la diapo suivante. Une façon de communiquer qui n’est pas des plus élégantes. Parfois les interprètes peuvent y remédier et anticiper afin d’être en phase avec l’orateur, mais cela ne réussit pas toujours. Ce qui marche toujours en revanche, c’est quand l’orateur attend quelques secondes avant de passer à la diapo suivante.

Un bref moment d’arrêt à point nommé ne ruine pas le rythme de votre présentation. Au contraire : vos explications sont ventilées, le public peut respirer et assimiler vos derniers mots. Quelques secondes suffisent aux interprètes pour terminer soigneusement leur traduction et donnent à l’orateur le loisir de se concentrer avant de poursuivre. Que des avantages, en somme. Tout cela au bénéfice du public : n’est-ce pas ce qui importe ?

Laissez l’encadrement de missions d’interprétation aux interprètes

Posted on 15 mai 201416 janvier 2018Categories Blog, InterprétationTags , ,

Je ne peux plus me taire. J’aime travailler pour des clients directs, mais également en sous-traitance. D’ailleurs, dans le monde de l’interprétation, les deux vont de pair, car pour la plupart des missions, les interprètes travaillent en binôme. Étant donné que la plupart des interprètes sont free-lance, nous avons souvent recours aux services de nos collègues. Je n’ai donc pas de difficultés à travailler pour des collègues ou des agences. Par contre, je remarque de plus en plus que les agences ne connaissent pas (ou plus ?) le monde dans lequel ils travaillent. Et non, je ne parle pas de mes collègues interprètes. Eux savent comment encadrer une mission d’interprétation et ce dont les interprètes ont besoin pour bien faire leur travail. Ce qui m’exaspère surtout ces derniers temps, ce sont les agences de traduction qui se lancent dans le monde de l’interprétation alors qu’ils connaissent seulement les traductions écrites et dont le personnel n’a jamais mis un pied dans une cabine.

Dernièrement encore, je me suis retrouvé dans une situation invraisemblable. C’était le chaos – un cauchemar pour un esprit structuré comme le mien. Une mission en sous-traitance, pour une « agence de traduction » à Alost, avec pour client final une multinationale gigantesque établie à Alost. Une assemblée générale, nous avait-on dit. De 14h à 17h. Tout allait bien, on nous avait même envoyé des présentations PowerPoint avec beaucoup de chiffres, ce qui est toujours pratique. Je me suis donc rendu sur place préparé et confiant.

La première chose que l’on m’a racontée sur place était que l’horaire qui m’avait été communiqué, était incorrect. Apparemment, mon collègue et moi devions être présents de 14h30 à 18h. Ajoutez à cela le retard habituel et vous vous retrouvez avec un client qui a besoin d’une heure et demi d’interprétation en plus que prévu. Le client  était convaincu d’avoir communiqué ces heures à l’agence ; l’horaire avait en effet été fixé longtemps à l’avance et n’avait plus été changé. Mais l’aventure ne s’arrêtait pas là.

L’assemblée générale n’était pas seulement vouée aux chiffres. Non, les différents services allaient également dévoiler leurs projets (plutôt techniques). Quel bonheur ! Malheureusement aucune information ne nous était parvenue et nous étions pris à l’improviste. Il ne nous restait plus qu’à improviser, quoique cela s’avère compliqué quand il s’agit de chambres de déviation, de pieux sécants et de différentes sortes de navires. Bien sûr que nous étions contents que la présentation fût truffée de nombreuses images, notre seule bouée de sauvetage. Sans parler de la technique : un volume carrément insuffisant et une cabine grognante (j’y ai en effet appris qu’une cabine peut grogner).

Bref, pourquoi en parler ici et maintenant ? Ne vous laissez pas leurrer par le site Web d’une agence de traduction. Chaque agence prétend vous offrir la meilleure qualité au meilleur prix (et généralement dans les meilleurs délais aussi), alors que la traduction et l’interprétation exigent deux approches complètement différentes. Un interprète n’encadrera peut-être pas un projet de traduction comme il sied, mais un traducteur ne sera à son tour pas capable non plus d’encadrer une mission d’interprétation. Adressez-vous à une agence gérée par des interprètes pour vos missions d’interprétation. Assurez-vous que l’information préparatoire soit réellement envoyée aux interprètes. Toute l’information pratique, comme l’horaire et le lieu du rassemblement, mais également l’information sur le contenu.

L’interprétation coûte cher. Faites en sorte que cet argent vous offre un retour. Les interprètes en valent l’investissement. Pour garantir la réussite, ayez recours à une véritable agence d’interprètes et non pas à une agence de traduction qui considère les missions d’interprétation comme un dérivé de son activité et ne s’y connait pas du tout.

Faut-il redorer le blason des traducteurs et des interprètes ?

Posted on 8 avril 201416 mars 2018Categories Blog, Commercial, Interprétation, TraductionTags , ,

Il y a quelques mois, Tom Van Cleempoel, Mick de Meyer et moi-même, en tant que fondateurs de GentVertaalt, étions réunis chez de Taalsector (vous savez bien, l’organisateur des Language Industry Awards) pour une interview. Un des sujets abordés était l’image du traducteur et de l’interprète lambda. Mandela venait tout juste d’être enterré.  De plus, au journal l’on parlait des tribunaux qui ont parfois recours au public pour l’interprétation. Le traducteur-interprète a une mauvaise image : grand temps donc d’en redorer le blason.

Réputation

Les traducteurs et interprètes n’ont pas toujours bonne réputation. Certains nous considèrent comme un mal nécessaire ou comme dernier recours quand le client n’a plus le temps de traduire soi-même. Certains traducteurs et interprètes sont bien évidemment eux-mêmes responsables de cette situation pénible. Mais bien souvent le client est en tort, car il souhaite tout simplement « une traduction » ou « un interprète » sans trop se soucier des détails. Naturellement, une traduction peut perdre sa pertinence sans contexte, étant donné que chaque traduction est différente. De même, certaines missions d’interprétation tombent à l’eau parce qu’un interprète n’a pas obtenu assez d’informations du client et est donc mal préparé.

Constats

Bien, outre toutes ces situations intolérables sur le marché qui alimentent cette perception négative, nous sommes obligés d’établir un autre constat. Si un traducteur ou un interprète fait bien son travail, il est discret. Lorsque son travail est de qualité douteuse, il se fait remarquer. Si tout va bien, personne ne pense à lui, alors que si les choses tournent mal, on parle de lui dans les médias. Souvenez-vous de la crise en Géorgie d’il y a quelques années. Le président français de l’époque avait négocié un accord entre les parties belligérantes, qui a quasiment capoté par une erreur de traduction. Et en effet, cette nouvelle a fait la une. Mais quand des lois sont adoptées au Parlement parce que les interprètes ont livré un bon travail, seuls les parlementaires ramassent les fleurs et les interprètes ne sont même pas mentionnés. Nous ne devons pas constamment nous trouver sous le feu des projecteurs, mais n’oublions pas que nous avons réellement contribué à l’adoption de cette loi.

Le traducteur en tant que mécanicien ?

Faites la comparaison avec le métier du mécanicien. Le mécanicien résout constamment des cas problématiques et a – bien sûr –  l’impression que sa marque est de qualité lamentable. Il oublie les milliers de voitures qui circulent sans problèmes, car elles ne passent pas par son garage. Les traducteurs et interprètes sont logés à la même enseigne. Chaque fois que l’on parle de nous dans les nouvelles, c’est parce qu’un traducteur ou interprète a causé des problèmes. Comment nous faire confiance quand on est uniquement confronté aux cas problématiques ?

Rien n’est moins vrai

Je traduis et interprète presque quotidiennement sans causer d’incidents. Je facilite des réunions plurilingues grâce auxquelles des personnes qui ne parlent pas la même langue peuvent tout de même signer des accords. Tout peut donc se dérouler sans aucun problème. Il faut tout simplement savoir à qui il faut faire confiance et être certain que le client contribue à de bonnes conditions de travail, par exemple en envoyant assez d’information à l’avance. Nous n’avons pas besoin de grand-chose pour bien faire notre travail. Donnez-nous un coup de pouce ; nous avons tellement à vous offrir.